Galaxies à coquilles

Plan:

1. Présentation de mes travaux dans ce domaine
2. Découverte par Malin et Carter et premières observations
3. Modèles d'origine externe (fusion avec un compagnon)
4. Explications sur l'origine de ces coquilles
5. Bibliographie

1. Présentation de mes travaux dans ce domaine

Je présente ici le thème des galaxies à coquilles, sur lequel j'ai travaillé pendant une quinzaine d'années, mais actuellement mes sujets de recherche en sont fort éloignés.

Le sujet de ma thèse concernait l'"Etude des galaxies à coquilles" (Prieur, 1988b). Pour permettre sa lecture en ligne, j'ai récemment commencé à traduire le manuscript de cette thèse en format PDF (voir version de ma thèse en cours de conversion PDF).

Certaines galaxies elliptiques présentent des structures lumineuses à bords abrupts en forme d'arcs, que l'on appelle coquilles. D'après les modèles les plus couramment admis, ce sont des ondes de densité constituées d'étoiles provenant d'une petite galaxie qui aurait fusionné avec la galaxie elliptique.

Au cours de ma thèse (1985-1988), j'ai principalement étudié la galaxie NGC 3923, qui possède de nombreuses coquilles alignées avec le grand axe de la galaxie (Prieur, 1988a).

J'ai ensuite étendu mon étude à toutes les galaxies à coquilles connues à cette époque, avec une étude statistique (Prieur, 1988c, 1989). En collaboration avec une équipe anglo-australienne, nous avons entrepris un ``survey'' spectroscopique (Carter et al. 1988) qui a montré qu'une fraction importante des galaxies (20%) avait connut un épisode récent de formation stellaire. Mon dernier travail dans ce domaine, concerne la galaxie anonyme 0422-476 dont les positions angulaires des coquilles sont réparties de façon aléatoire autour du centre de la galaxie (Wilkinson et al., 2000).


 
 

2. `Découverte'' par Malin et Carter et premières observations

Un traitement original des plaques photographiques...

Vers la fin des années 1970, David Malin, photographe à l'Observatoire Anglo-Australien d'Epping développe des techniques de traitement photographiques qu'il applique aux plaques de Schmidt obtenues dans le cadre du Survey SRC/ESO (British Science Research Council, et European Southern Observatory) et à des plaques prises au foyer du nouveau télescope Anglo-Australien (AAT, Anglo-Australian Telescope).

La qualité de la nouvelle émulsion IIIaJ, celle des instruments utilisés dans un bon site (Siding Spring, Australie) et les talents de D. Malin conduisent à des clichés remarquables qui vont très au-delà de la vision qu'on se faisait du ciel de l'hémisphère Sud (Malin 1977, 1978).

Dans la moisson de nouveaux résultats on remarque autour de nombreuses galaxies elliptiques la présence de structures en forme d'arcs, de faible brillance de surface mais à bords abrupts, qui apparaissent grossièrement concentriques et parfois fort éloignées de la galaxie centrale. L'une d'elles, NGC 3923, présente une vingtaine de ces structures que D. Malin appelle ``shells'' (ou coquilles en français) (Malin et Carter 1980).

Pour la détection de ces coquilles externes, Malin utilise une technique de rehaussement de contraste basée sur la propriété que les détails de faible intensité sont enregistrés au voisinage de la surface de la gélatine, alors que les densités plus importantes sont situées plus en profondeur (Malin 1978, 1981).

Pour les coquilles internes qui sont superposées à des densités élevées à cause de la luminosité de la galaxie, il utilise la technique de masque flou photographique qui consiste à isoler les hautes fréquences spatiales en soustrayant une image à sa transformée par défocalisation (Malin 1977).

Catalogue de Malin et Carter (1983):

Au début des années 1980, D. Carter et D. Malin entreprennent une recherche systématique des galaxies à coquilles sur les clichés du Survey SRC/ESO de l'hémisphère sud en IIIaJ, par examen visuel des 606 clichés constituant ce survey, sous forme de copies sur plan film lorsqu'elles sont disponibles ou directement les plaques de verre à Siding Spring. Leur travail conduit à la publication d'un catalogue de 137 galaxies à coquilles (Malin et Carter, 1983) qui couvre l'étendue du Survey, soit environ un tiers du ciel, de déclinaison inférieure à -17 degrés.

En fait, on connaissait quelques cas de galaxies présentant ce type de structures bien avant les travaux de Malin et Carter. On peut noter par exemple la présence de galaxies coquilles dans le catalogue de galaxies anormales de Arp (Arp 1966), déjà classées sous la rubrique ``shell galaxies'' (Arp 223, Arp 227=NGC 474, Arp 228=IC 162, Arp 229=NGC 505-508, Arp 230, et Arp 231=IC 1575 par exemple). Mais Malin et Carter sont les premiers à montrer qu'il ne s'agit pas d'un phénomène marginal et sans importance. D'après leur catalogue, au moins 6% des galaxies elliptiques sont des galaxies à coquilles, cette valeur passant à 17% si on ne s'intéresse qu'aux galaxies elliptiques de champ.

Premières observations en 1982:

En 1981, Quinn et Carter (Quinn, 1982) font des observations spectroscopiques à l'AAT des galaxies à coquilles NGC 3923 et NGC 1344. Malgré la longue intégration (2h pour NGC 3923 et 3h pour NGC 1344), l'allure générale du spectre, la vitesse de récession (``redshift'') et la dispersion des vitesses ne présentent aucune particularité à l'emplacement des coquilles. On n'y observe aucune raie d'émission.

Carter et al (1982) observent la coquille la plus externe de NGC 1344, avec une caméra à comptage en B, V, R, et un photomètre infra-rouge. D'après les indices de couleur de cette coquille, ils concluent que les coquilles sont de nature stellaire et ne sont pas le résultat d'une formation récente d'étoiles. La population stellaire est comparable aux types G5-K0.

Ces tout premiers résultats qualitatifs ou très fragmentaires au niveau photométrique vont suffire à alimenter les spéculations théoriques.

3. Modèles d'origine externe (fusion avec un compagnon)

A la même époque où Malin et Carter découvraient ces galaxies à coquilles, Peter Quinn était étudiant à l'observatoire du Mt Stromlo (Australie) et travaillait avec Ken Freeman sur la modélisation de collisions de galaxies spirales.

P. Quinn commence à étudier l'idée proposée par Schweizer (1980) selon laquelle les coquilles pourraient être le résultat de collisions entre galaxies. Il effectue de nombreuses simulations numériques de collisions radiales d'une galaxie elliptique avec un compagnon-disque, où il fait apparaître des structures tout à fait semblables aux coquilles que l'on observe.

Il en déduit un modèle simple de formation inspiré du mécanisme de la relaxation violente (Lynden-Bell 1967) qu'il présente dans sa thèse (Quinn 1982). Les coquilles seraient ainsi des ondes de densité formées par les étoiles d'un compagnon absorbé par la galaxie centrale à la suite d'une collision radiale ou à très faible moment angulaire.

4. Explications sur l'origine de ces coquilles:

Lorsqu'une galaxie-compagnon percute de plein fouet une galaxie elliptique plus massive, elle est détruite par les forces de marée et ses étoiles oscillent indépendamment les unes des autres dans le puits de potentiel gravitationnel de la galaxie. Lorsque ces étoiles atteignent leur apocentre (élongation maximale dans leur mouvement pendulaire), leur vitesse s'annule, ce qui crée un point d'accumulation : c'est une coquille.

En fait, on ne ``voit'' les étoiles qu'au voisinage immédiat de leur apocentre, sinon elles sont confondues avec les étoiles de la galaxie-hôte. A cause de la dispersion des énergies des étoiles du compagnon, il y a un étalement des distances apocentriques et des périodes. La distribution des coquilles est discrète car, pour un instant donné, seules des positions bien définies, à l'intérieur de cette plage de distances apocentriques permises, correspondent à un apocentre d'étoiles.

5. Bibliographie:

Arp, H.C. 1966, Atlas of Peculiar Galaxies (California Institute of Technology Press)

Carter, D., Allen, D.A., Malin, D.F., 1982, Nature 295, 126.

Lynden-Bell, D. 1967, MNRAS 136, 101.

Malin, D.F. 1977, A.A.S. Photo-Bulletin 16, 10.

Malin, D.F. 1978, Nature 276, 591.

Malin, D.F. 1981, A.A.S. Photo-Bulletin 27, 4.

Malin, D.F., Carter, D. 1980, Nature 285, 643.

Malin, D.F., Carter, D. 1983, ApJ 274, 534.

Quinn, P.J., 1982, Ph.D. Thesis Australian National University.

Schweizer, F. 1980, Apj 237, 303.

Mes publications: